COMMENT ME PLAGIER AVEC GOÛT
Philipp Timischl , Pierre-Alexandre Mateos et Charles Teyssou
Entrepôt jusqu'au 25 août

le vendredi 7 juin à 19h :

VERNISSAGE(S)

CONCERTS
de Babymorocco et M3C
[Hyperpop]



En parallèle,
inauguration des expositions
Km 316 d'Axel Amiaud (Galerie) et STRIPBURGER (Fanzino)

entrée libre
Exposition  
   

Exposition visible du 8 juin au 25 août 2024

du mercredi au vendredi de 12h à 18h, le week-end de 14h à 18h et les soirs d’événements.

Comment me plagier avec goût repose sur trois installations exaltant les obsessions de Timischl depuis ses débuts d’artiste dans son Autriche natale des années 10 à savoir la fluidité et la performativité des identités, des médiums et des objets culturels (de la masculinité à la bourgeoisie). A travers des peintures et des peintures-écrans, installations vidéo ou textes, il questionne sur un registre camp, naïf, corrosif ou déterminé la réalité des incarnations et la manière dont elles nous informent. Distinction sociale, passing de genre et de classe, politique des goûts, omniprésence de l'image, authenticité de l’œuvre sont au cœur de cette exposition.

Une dizaine de peintures grises monochromes trônent dans la salle centrale du Confort Moderne. Ses grands volumes à l’allure sévère rappellent d’abord les peintures trophées qu’affectionnent les musées fascinés par la pompe des avant-gardes. Si le monochrome est tour à tour vu comme un objet d’élévation spirituel, révolutionnaire, sacré, pur, médiumnique, matérialiste, conceptuel ou hermétique, il est avant tout devenu bourgeois.  Par leur répétition parodique, ils deviennent des prototypes, des étalons or du bon goût autorisé. Mais en adjoignant des écrans en leur bases, Philipp Timischl pratique surtout une peinture en champ élargi, impure, hybride, poreuse à des flux et des nouveaux réseaux d’images. En transformant ses toiles BCBG en espaces de de circulation pour des films queer, pop et emo, il fait la jonction improbable entre Gertrude Stein et Cardi B, Clément Greenberg et Avicii, Barnett Newman et Lady Gaga. Mes derrières leurs apparences sérielles de clones bipolaires, les toiles ont chacunes leurs personnalités et assument un script ou roleplay : punk et hostile ; dépressive ; affamée de plan sur Grindr  ; survivante traumatisée du programme de télé réalité américain Jersey Shore, non binaire, intellectuelle hard-edge. Toutes jouent et s’interrogent sur leurs états, leurs identités mais aussi sur qui vous êtes : le public de l’art contemporain. Passant de la mélancolie à l'arrogance, de la complainte à l’euphorie en 24 images par seconde, elles finissent par se synchroniser pour incarner une diagonale du vide et aiguiller le regard vers le mur d’écran monumental qui fend l’espace. SLAY.

Ce Léviathan d’écrans LED qui pourrait provenir du Tomorrow Festival ou d’une fête gay pour Circuit Boys à Sitges, adopte le point de vue de l’artiste et dérive dans l’exposition du Confort Moderne.  Dans une boucle sans fin, le spectateur peut visiter l'exposition à travers les yeux du téléphone de Timischl, des toilettes à la white cube. L’exposition se passe désormais là. Dans ce panorama sont diffusés à la manière d’une mini-rétrospective six vidéos de l’artiste mixant télé-réalité et poésie concrète, images privés et publiques, tonalités tacky et low key. On y voit Philipp Timischl en Phil Up son personnage de drag-queen badass (clip pour Lonely Boys, Inspire me), sa simple life en road-trips où il parcourt la Corse (Corsica 2013, 2013) et les États Unis (Reality is the worst-case scenario, 2022), des extraits dramas des séries Lost ou de True Detective (PROBLEMS, 2014), ou son ancien studio à Vienne (FULL MOTION, 2012). Cet écran sous stéroïdes au montage saccadé force le spectateur à se déplacer d’un bout à l’autre de l’espace. Move Bitch !

À la manière du scrolling incessant sur les réseaux sociaux, ou de la stimulation visuelle des écrans publicitaires, l’œuvre crée un étourdissement, un flottement ou une impossibilité d’absorber la totalité des signes. L’artiste comme l’institution est toujours aux commandes, elle dirige et domine le spectateur et Philipp Timischl pourrait en être le Cashmaster (ces figures d’internet BDSM qui dominent virtuellement en échange d'argent ou de rétributions symboliques.) La vidéo se termine par une image filmée de l'arrière de l'écran, doublée par le cumshot de son propre film porno / sex tape auto-édité BEN PORN, 2015. L'avant est ici l'arrière. The top is the bottom. Et vice versa.

Dans la salle adjacente, une peinture lévite en majesté. A la surcharge de communication de la salle multimédia, cette toile de style expressionniste abstrait aux aplats texturés renvoie à la sacro-sainte intériorité de l’artiste. Ici encore ce sont aussi les canons du modernisme qui sont traités avec irrévérence. Il n’y a rien d’autre à ajouter.

Une dernière toile raconte les aventures de Ronny Racoon, un livre pour enfants cruel et démoralisant devenu poème, dans lequel nous suivons un raton laveur issu d'une famille modeste et ses tentatives pour changer de classe sociale. Cet anti-héros antipathique, ébloui par les paillettes et le glamour, rejetant ses parents et son héritage, finit par être dévoré dans un monde brutal et hiérarchisé. Victime d'une série d'accidents : un bouchon de champagne qui le défigure, une chute d'un yacht ou d'une loge d'opéra, il finit écrasé par une sculpture grecque alors qu'il aurait dû et pu rester chez lui à regarder la télé-réalité...Dans ce roman anti-initiatique conçu par l'IA et ChatGPT, Philipp Timischl brise le mythe des transgresseurs de classes sociales et offre une remise en question brutale de la réalité, interrogeant l'inévitabilité du déterminisme et illustrant les dures vérités des structures sociétales.

Dans la lignée du capitalisme réalisme allemand des années 60, cousin grinçant du pop art américain, Philipp Timischl érige la figure de l’artiste en commentateur caustique des postures sociales et des faux semblants du monde de l’art. Empruntant au modernisme, au cartoon, et cultures mainstreams, Philippe Timischl rend compte d’une réalité fluide, insaisissable qui rend caduque nos présupposés. La notion d’auteur est cannibalisée par la machine, les œuvres supposées muettes sont extraverties, le désir d'autodétermination confronté à la violence du réel. Philipp Timischl est l’enfant illégitime du sociologue Pierre Bourdieu et de la reine des drag queens, Rupaul. La pratique de l’artiste fait le croisement entre l’analyse de la culture comme arme de différenciation sociale du premier avec l’idée de pastiche de goût, d’ironie et de la bêtise comme mode de d’engagement politique incarné par le second. A la fiction néo-libérale diffusée massivement par les images selon laquelle tout serait possible, il postule une drag reality outrée, hypertrophiée et par la même démystificatrice.Comment me plagier avec goût. 

Pierre-Alexandre Mateos & Charles Teyssou

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Comment me plagier avec goût (How to tastefully plagiarise myself) is based on three installations that exalt Timischl's obsessions from his early days as an artist in his native Austria in the 2010s, namely the fluidity and performativity of identities, mediums, and cultural objects (from masculinity to the bourgeoisie). Through paintings and screen-paintings, video installations and texts, he questions, in a camp, naive, corrosive or determined register, the reality of incarnations and the way they inform us. Social distinction, gender and class passing, the politics of taste, the omnipresence of the image and the authenticity of the work are at the heart of this exhibition.

Ten monochrome gray paintings dominate the central hall of the Confort Moderne. These large, severe-looking volumes initially evoke the trophy paintings that museums fascinated by the pomp of the avant-gardes tend to favor. While the monochrome is alternately seen as an object of spiritual elevation, revolutionary, sacred, pure, mediumistic, materialistic, conceptual, or hermetic, it has above all become bourgeois. Through their parodic repetition, they become prototypes, gold standards of authorized good taste. However, by attaching screens at their bases, Philipp Timischl primarily practices an expanded field of painting—impure, hybrid, and porous to the flow of new image networks. By transforming his preppy canvases into circulation spaces for queer, pop and emo films, he makes the unlikely junction between Gertrude Stein and Cardi B, Clément Greenberg and Avicii, Barnett Newman and Lady Gaga. Despite their serial appearances as bipolar clones, the canvases each have their own personalities and assume a script or roleplay: punk and hostile; depressive; hungry for hookups on Grindr; a traumatized survivor of the American reality TV show Jersey Shore; non-binary; hard-edge intellectual. They all play and question their states, their identities, but also who you are: the contemporary art audience. Passing from melancholy to arrogance, from lament to euphoria in 24 frames per second, they end up synchronizing to embody a diagonal of emptiness and guide the gaze towards the monumental screen wall that splits the space. SLAY.

This leviathan of LED screens, which could originate from the Tomorrow Festival or a gay party for Circuit Boys in Sitges, adopts the artist's perspective and drifts through the Confort Moderne exhibition. In an endless loop, the spectator can visit the exhibition through the eyes of Timischl's phone, from the restrooms to the white cube.From now on, the exhibition will take place inside the screen. In this panorama, six of the artist's videos are shown like a mini-retrospective mixing reality TV and concrete poetry, private and public images, tacky and low-key tones. We see Philipp Timischl as Phil Up, his drag-queen badass persona (music video for Lonely Boys, Inspire me), his simple life during road-trips through Corsica (Corsica 2013, 2013) and the USA (Reality is the worst-case scenario, 2022), dramatic extracts from dozens of TV series like Lost or True Detective (PROBLEMS, 2014), or his former studio in Vienna (FULL MOTION, 2012). This screen on steroids, with its jerky editing, forces viewers to move from one end of space to the other. Move Bitch!

Like the incessant scrolling on social networks or the visual stimulation of advertising screens, the work creates a dizziness, a sense of floating, or an impossibility to absorb all the signs. The artist, like the institution, is always in command, directing and dominating the viewer, and Philipp Timischl could be the Cashmaster (These BDSM internet figures dominate virtually in exchange for money or symbolic retribution). The video ends with an image shot from behind the screen, doubled by the cumshot of his own porn / self-released sex tape BEN PORN, 2015. The front is the back. The top is the bottom. And vice versa. 

In the adjacent room, a painting levitates majestically. In contrast to the communication overload of the multimedia room, this abstract expressionist style canvas with textured flat areas refers to the sacrosanct interiority of the artist. Here again, the canons of modernism are treated irreverently. There is nothing more to add.

A final canvas tells the adventures of Ronny Raccoon, a cruel and demoralizing children's book turned poem, in which we follow a raccoon from a modest family and his attempts to change his social class. This unlikable anti-hero, dazzled by glitz and glamour, and rejecting his parents and his heritage ends up devoured in a brutal, hierarchical world. Victim of a series of accidents: a disfiguring champagne cork, a fall from a yacht or an opera box, he ends up crushed by a Greek sculpture when he should and could have just stayed at home and watched reality TV... In this anti-initiation novel conceived by AI and ChatGPT, Philipp Timischl breaks the myth of social class transgressors and provides a stark reality check, questioning the inevitability of determinism and illustrating the harsh truths of societal structures.

Following in the footsteps of the German capitalist realism of the 60s, a cranky cousin of American pop art, Philipp Timischl sets up the figure of the artist as a caustic commentator on the social postures and false pretenses of the art world. Borrowing from modernism, cartoons and mainstream cultures, Timischl reveals a fluid, elusive reality that renders our assumptions obsolete. The notion of the author is cannibalized by the machine, the supposedly mute works are extroverted, and the desire for self-determination is confronted with the violence of reality.Philipp Timischl is the illegitimate child of sociologist Pierre Bourdieu and the queen of drag queens, RuPaul.The artist's practice intersects the first's analysis of culture as a weapon of social differentiation with the second's idea of pastiche of taste, irony, and foolishness as a mode of political engagement.Against the neo-liberal fiction massively disseminated by images that everything is possible, he proposes an outrageous, hypertrophied drag reality that simultaneously demystifies. How to tastefully plagiarize myself.

Philipp Timischl
Peinture, vidéo, installation
Paris
 

Né en 1989, à Graz 
Originaire de la campagne autrichienne, il vit et travaille actuellement à Paris. Sa pratique consiste principalement à combiner la peinture et la vidéo, en incluant souvent du texte et en aboutissant à des installations spécifiques. Le travail de Timischl est plein d’humour, tout en explorant les thèmes récurrents de la dynamique du pouvoir entre les classes sociales, souvent en relation avec l’homosexualité, les origines et le monde de l’art

Depuis qu’il est diplômé de l’Académie des beaux-arts de Vienne, il a exposé en solo à la Secession, Vienne ; High Art, Paris ; Layr, Vienne ; MGK Siegen, Siegen ; Heidelberger Kunstverein, Heidelberg ; Halle für Kunst, Lüneburg ; Vilma Gold, Londres ; Neue Alte Brücke, Francfort ; Martos, Los Angeles ; Künstlerhaus Graz. Son travail a été présenté dans le cadre d’expositions collectives à la NGV Triennial, Melbourne ; à la Biennale de Lyon, Lyon ; à Méca Bordeaux ; à l’ICA Londres ; au MAK Vienne ; à la Kunsthalle Bern ; au Kunstwerke Berlin ; à la Luma Foundation, Zürich ; à la Fondazione Sandretto re Rabaudengo, Turin ; à la Kunsthalle Vienne et à la Serpentine Gallery, Londres.

Born in 1989, in Graz.
Coming from the rural countryside of Austria he is now living and working in Paris, France. His practice mainly consists 
of combining painting with video, often including text and culminating in sitespecific installations. Timischl’s work is filled with humor, while also delving into the recurring themes of power dynamics between social classes, often in relation to queerness, origins, and the art world.

Since graduating from the Academy of fine Arts in Vienna, he recently had solo exhibitions at Secession, Vienna; High Art, Paris; Layr, Vienna; MGK Siegen, Siegen; Heidelberger Kunstverein, Heidelberg; Halle für Kunst, Lüneburg; Vilma Gold, London; Neue Alte Brücke, Frankfurt; Martos, Los Angeles; Künstlerhaus Graz. His work was shown in group exhibitions at NGV Triennial, Melbourne; Biennale de Lyon, Lyon; Méca Bordeaux; ICA London; MAK Vienna; Kunsthalle Bern; Kunstwerke Berlin; Luma Foundation, Zürich; Fondazione Sandretto re Rabaudengo, Turin; Kunsthalle Vienna and Serpentine Gallery, London.

Pierre-Alexandre Mateos et Charles Teyssou
Commissariat
Paris
 
Duo de curateurs, leurs projets actuels incluent Paris Orbital, un programme public à la Collection Pinault - Bourse de Commerce sur les liens entre les mythologies parisiennes et la culture pulp, une publication sur le cruising homosexuelle avec HEAD (Genève) et Spector Books (Leipzig). Ils organisent également le programme des Conversations de Paris+ par Art Basel en octobre 2024. En 2024, ils inaugureront la première session de Stavanger Secession, un programme discursif et visuel à Stavanger (Norvège).

Duo of curators, their current projects include Paris Orbital, a public program at the Pinault Collection - Bourse de Commerce on the links between Parisian mythologies and pulp culture, a publication onhomosexual cruising with HEAD (Geneva) and Spector Books (Leipzig). They also organise the Art Basel’s Conversations de Paris+ program in October 2024. In 2024, they will inaugurate the first session of stavanger secession, a discursive and visual program in Stavanger (Norway).